....Esprit Trail

Pourquoi faire de l´Ultra …. C´est une question simple à laquelle j´ai envie de répondre « pourquoi pas »

Mais cette réponse ne convient pas quand on s´engage sur des courses qui font 4 fois un marathon en distance et 2 fois le dénivelé de l´Everest depuis le camp de base (Caractéristique de l´UTMB)

En plus je viens de faire une course de 50 km dans la Clape à Gruissan où j´ai beaucoup souffert pour des raisons variées et la facilité aurait été d´abandonner.

Non décidemment la raison de la pratique de ce genre de sport demande une autre réponse que je vais essayer de détailler.

Tout d´abord pratiquer un sport limité qu´à un cercle assez réduit d´initié est assez valorisant. On n´est pas insensible à l´admiration que l´on suggère chez ceux qui ont eu vent de nos aventures. C´est peut être un peu de manque d´humilité mais c´est aussi très humain. Toutefois ce critère là n´est pas dominant dans le choix de ce sport, il est présent mais quand on décide de participer à cette épreuve on ne pense pas à ce qu´on va raconter, on pense surtout à la finir.

Pour remonter à la pratique de ce sport, je dois peut être chercher dans mes souvenirs d´enfance. Je me souviens du Tour de France et des étapes de montagne qui me faisaient rêver. Quand j´ai appris à faire du vélo et à me rendre ce que voulait dire monter des cols, j´ai vite compris la difficulté d´une telle épreuve.

En fait la raison de cette pratique, c´est bien le rêve qu´il procure… le rêve peut se transformer en cauchemar et le plaisir en douleur.

Certes la performance et le dépassement de soi sont des moteurs à cette motivation, mais ce qui me pousse à envoyer mon inscription dans une course très longue, c´est l´aventure que je vais y vivre. On sait qu´on passera par tous les états, mais on se dit que c´est unique. C´est une chance énorme que de vivre ce genre d´expérience … alors vivons là.

Je suis persuadé que finir une épreuve très longue est à la portée de beaucoup de personnes, il faut se donner les moyens et se forger un moral de finisher !

Le goût de l´aventure, voici, à mon avis, le véritable moteur de notre engagement. D´ailleurs la musique de départ du Tour du Mont blanc est celle du film 1492 de Vangelis. Elle correspond vraiment à cet esprit de découverte …

On pourrait vivre une aventure sans aller au delà de ses limites … c´est certain, mais c´est tellement plus beau quand on passe par des moments de doute, de bonheur, de souffrance. On peut paraître un peu fou auprès de certains … mais comme disait Audiard « Heureux les gens fêlés car ils laissent passer la lumière »

Eric AMAR


collègues de travail - collègues d'endurance - l'équipe des trailers du Mipih
ils étaient au départ du Grand Raid des Pyrénées
Eric a déjà écrit un article sur ce thème dans le cadre du site du club de Port (portet.ac.free.fr) Nous pensons qu'il est intéressant à lire et complète ce qui a été rédigé ci-dessus. Avec son autorisation, voici ce qu'il écrivait :

Du 10km à l'Ultra

Aujourd'hui la tendance est à la course longue ... voire très longue. Je reprendrai la définition d'un ultra défini par le magazine Ultrafondus : Un Ultra est une course qui dépasse le marathon en distance.

Les ultras commencent à voir le jour un peu partout... des 100 km ou des 24h sur route, des Ultras trails. Coté ultra Trail, le Grand Raid de la Réunion, le Tour du Mont Blanc ou les templiers sont les plus connus, mais derrière d'autres commencent à se frayer un chemin ... plutôt un sentier.
Certains coureurs se disent que ces courses sont trop dures et ne sont pas pour eux ... d'autres aimeraient bien tenter mais ne savent pas par quel bout commencer. Tout d'abord, ces courses ne sont pas réservées à une élite (sauf pour ceux qui visent les premières places)... finir un ultra dépend de 2 facteurs :
- Bonne préparation
- super mental (le mental c'est plus de 50% de la course)

Avant de détailler un peu plus ces points, je vais m'attarder sur la question "Pourquoi faire un ultra ?"
Pourquoi aller souffrir sur des courses dépassant les 50 km, 100 km ou même 150 km avec des dénivelés positif de 4000 m, 5000m ou même 9000 m !
Il faut goûter pour se laisser prendre à ce jeu. Dans ce genre de course, l'objectif est de finir (sauf peut être pour l'élite qui vise la victoire). On ne court pas contre l'autre mais contre soi, contre ses limites. D'ailleurs, l'esprit dans ces courses est particulier, il y a une solidarité et un grand respect de l'environnement. Personnellement mon premier ultra a été un long calvaire... je m'étais promis de ne plus recommencer ... J'avais commis pas mal d'erreurs sur cette première, tout d'abord j'ai fait ma course en fonction des autres et non en fonction de ce que je ressentais. Au fil des courses, j'ai appris à mieux me connaître, à endurer, à laisser passer les moments difficiles.
Au fil des courses on repousse certaines barrières. Le corps se fixe des limites pour nous protéger et par habitude. Si vous vous levez tous les jours à 9h du matin, et qu'un jour vous vous levez à 5h du matin votre corps va avoir du mal. Par contre au bout d'un certain temps, votre corps s'habituera à ce réveil. Je pense qu'il en est de même pour l'Ultra... au bout d'un certain temps le corps repousse cette barrière virtuelle qui n'attendait que cela. Il m'arrive d'augmenter sur quelques semaines mon entraînement hebdomadaire... au début c'est assez difficile, puis après avoir passé le cap, je me sens mieux.
Comment passer du 10 km à l'ultra
Si on m'avait dit en 2002 que je ferais un jour le Tour du Mont Blanc, j'aurais bien rigolé en disant que cette course est réservée au top niveau... ben aujourd'hui je me rends compte que j'avais tort, la preuve je l'ai fini ! Mes courses à cette époque se limitaient à des 10km ou des semi marathons... je tentais en 2002 mon premier marathon.
J'ai commencé par un premier trail, puis un 2ème ... j'ai fait les Templiers qui a été une course détonatrice.
L'ambiance, le paysage ... un grand moment qui m'a donné envie de continuer. Coté entraînements ... j'ai diminué ma vitesse d'entraînement et j'ai augmenté la durée. J'essayais de finir avec un bon état de fraîcheur après une sortie de 3h.
J'ai commencé à alterner avec un peu de vélo ce qui est bénéfique.
J'ai ensuite vite compris que la différence c'est le mental. Ce qui permet d'aller plus loin c'est la tête. Dans une course comme cela on passe par différents états. Il faut savoir gérer, bien s'alimenter, se reposer ... apprendre à se connaître !
J'ai donc augmenté mes entraînements mais sans vraiment dépasser 60 km / semaine (3 ou 4 sorties)
Il faut donc se lancer et faire cette course pour soi ... (le classement et le temps sont secondaires ... il faut juste finir dans le temps limite)

La souffrance n'est pas une limite
Sur ces courses on souffre, elles sont tellement longues qu'on passera par des moments durs où il faudra gérer la fatigue, la douleur ... peut être des pépins physiques. Le mental prend alors un sacré coup ... un coup au moral. A ce moment là, la fatigue s'accélère et il faut lutter. C'est pour cela que ce genre de course est plus mental que physique (même si il faut être prêt physiquement). Il faut se dire que sur ce genre d'épreuve, on va rencontrer des problèmes et qu'il faudra continuer malgré tout.
Sur mon premier tour du Mont Blanc, je n'étais pas dans un bon jour, j'ai accumulé les pépins physiques... j'étais sur le bord de l'abandon à plusieurs reprises. Mon genou m'a tout d'un coup rappelé à l'ordre au 90ème km ... il a commencé à pleuvoir et la nuit est tombé, j'ai finalement jeté l'éponge au 102ème km. J'ai craqué mentalement. Il faut tirer les conséquences de ces échecs pour construire la suite. Cet échec a aussi renforcé mon mental pour retenter l'UTMB et cette fois le finir.
Il faut aussi savoir s'arrêter avant d'arriver à un point de non retour. J'ai croisé des coureurs blessés ou qui ne pouvaient plus rien avaler de nourriture sans vomir ... là cela devient dangereux et renoncer est la voie de la sagesse.

J'espère que ces quelques lignes vous feront poser la question ... "pourquoi pas moi ?"
Moi je vous le souhaite car faire ce genre de course est une chance qu'il faut saisir !
Eric AMAR
Merci à Eric de son témoignage.
le Grand Raid des Pyrénées en Rando